La partition oubliée

Synopsis

Franck a connu son heure de gloire comme reporter, mais depuis un an, il n’est plus que l’ombre de lui-même. Il est sous le choc d’une rupture aussi soudaine qu’incompréhensible d’une relation amoureuse qui s’annonçait pleine de promesses.
Aussi, lorsque son boss le charge de faire un papier sur un opéra qui va être présenté au festival d’Aix-en-Provence - œuvre auréolée de mystère, car on n’en connaît ni l’auteur ni le thème - il n’espère qu’une chose : en avoir fini au plus vite avec cette histoire. Mais, très vite, une succession d’événements vont venir perturber ce qui n’aurait dû être qu’un banal reportage : Jenny, une adolescente mal dans sa peau, rêveuse et fascinée par cet opéra, se met en tête de l’accompagner. Ensuite, lorsque Franck, pris au jeu et intrigué malgré lui, finit par découvrir ce qui se cache derrière cette œuvre mystérieuse, il en ressort profondément troublé, mais il n’est pas au bout de ses peines, car tout se passe comme si des forces obscures cherchaient à empêcher la représentation de cet opéra, révélant l’existence d’un univers criminel tapi dans l’ombre.
Comment Franck arrivera-t-il à déjouer les menaces qui pèsent sur cet opéra ? Quel est le secret de cette œuvre inconnue et pourquoi suscite-t-elle tant de passions ? Autant de questions qui se poseront à Franck et qui ne trouveront de réponse pour lui et pour tous les protagonistes de cette aventure qu’au terme d’un suspense qui s’achèvera au tomber du rideau.

Le roman est disponible en e-book et en version papier

Avis et commentaires

4 étoiles Un beau livre.
« Comment concilier l'amour de la musique et celui du mystère ? Voilà, c'est fait. Ce polar a ravi ma soeur, grande amatrice des deux ! »

Extraits

Franck se redressa sur son lit, haletant…

 

J’étais à bout. Je n’avais cessé de m’agiter, de passer d’un décor à un autre, plus étrange encore que le précédent. J’avais parcouru des corridors interminables débouchant sur de grandes nefs vides, sorte de métro futuriste aux lignes baroques dessinées par un Gaudi en plein délire.

Dans ce labyrinthe dont l’architecte avait de toute évidence égaré les plans, j’avais de temps à autre croisé quelques visages familiers et entrevu des lieux plus chaleureux comme pour donner un début de sens à cette course absurde.

Seule présence insistante dans cet univers, une voix sourde dont l’écho se réverbérait sur les murs des couloirs, murmurant de façon lancinante : « Qu’est-ce que tu attends ? Vas-y ! »

Pas vraiment des mots. Plutôt une incantation, mais je comprenais parfaitement. Je savais qu’il y avait urgence.

Je le sentais.

La rencontre avec Michel n’avait fait que précipiter les choses.

Les visages de Paul et de Jenny surgirent, nimbés de cet air étrange que donne la connaissance des secrets et habités d’une joie qui échappait au commun des mortels.

L’évidence émergea du marasme apparent. Il fallait que je sache, moi aussi. Rien d’autre ne comptait.

Morale. Scrupules. Respect. Autant de foutaises que je balayai d’un revers de main.

L’opéra avait tué le fantôme qui était en moi et avait fait surgir le démon.

 

J’étais au pied du mur.

Au sens propre comme au sens figuré.

Par prudence, j’avais laissé ma voiture assez loin de la propriété et parcouru une centaine de mètres dans la semi-obscurité.

Je regardai tour à tour le portail et l’enceinte faite de grosses pierres. Les deux approches me parurent aussi risquées l’une que l’autre. La grille semblait offrir une meilleure prise pour l’escalade, mais je savais qu’une fois arrivé en haut, j’aurais du mal à basculer pour sauter de l’autre côté. Je m’agitai. Si je réfléchissais encore cinq minutes, ce serait foutu. Mes bonnes résolutions fondraient comme neige au soleil.

Je m’élançai, m’agrippai aux barreaux et me hissai jusqu’au sommet avec une sorte de rage animale avant de me laisser tomber.  

J’étouffai un cri.

Mon talon droit avait encaissé le choc. La douleur me déséquilibra. Je glissai et mon front heurta le métal de la grille. Je roulai dans l’herbe, haletant de trouille. Mon souffle devait s’entendre à des kilomètres à la ronde. Affolé, je me tournai vers la grande bâtisse.

Aucune lumière ne jaillit dans la nuit. Je réalisai alors ma folie et ma chance. Qu’aurais-je fait si quelqu’un avait veillé malgré l’heure tardive ?

L’idée ne m’avait même pas effleuré l’esprit. C’est dire si j’étais dans mon trip.

Je me ramassai et me mis à marcher vers l’entrée du bâtiment. La porte était faiblement éclairée par la lune. Je m’arrêtai et contemplai le battant comme si ma vie en dépendait.

J’avais tout misé sur le franchissement de la grille, je n’avais même pas envisagé que le portail puisse être verrouillé.

Restait la chance.

Mes mains étaient moites. J’essuyai la sueur sur mon pantalon. Il fallait que j’y aille. Je tendis le bras vers la poignée. Dans une seconde je saurais si j’avais eu raison d’écouter la voix lancinante qui avait traversé ma nuit ou si elle n’était que le reflet d’une agitation que je ne pouvais contrôler.

Que ferais-je si je trouvais porte close ?

Appeler Armila, arracher les jeunes à leur sommeil, leur faire savoir que j’étais là et supplier, s’il le fallait, qu’on me laisse entrer ?

J’étais devenu fou et tout m’était égal.

 

Je saisis le bec-de-cane et poussai la porte. Le battant bascula. Ma peur s’évanouit aussitôt. Ma torche électrique éclaira un long couloir. Il ressemblait à celui de mon rêve sauf qu’ici tout paraissait stable et rassurant. De toute évidence, les chambres devaient se trouver à l’étage et ce que je cherchais dans une des pièces du rez-de-chaussée.

Je poussai avec précaution la porte entrouverte qui se trouvait à ma gauche.

Je vis d’abord le dessin des fenêtres projeté sur le sol par la clarté lunaire.

La pièce était vaste, presque vide à l’exception d’une table placée contre un mur. Certainement l’endroit où ils répétaient. Le sang se précipita dans mes artères charriant avec lui les effluves d’une fièvre soudaine.

J’avais trouvé du premier coup !

Je pénétrai dans la salle.

Dans le faisceau lumineux apparurent des lutrins ornés de partitions et quelques vêtements entassés sur le parquet.

Je me dirigeai vers la table et braquai ma lampe. De grandes feuilles blanches couvertes de notes s’étalaient sur la surface lisse du meuble.

J’allais enfin savoir.

Je les feuilletai fébrilement, à la recherche d’un nom, mais je ne vis rien, car les notes dansaient devant mes yeux, innombrables comme des grains de sable.

J’écarquillai les yeux comme si cela avait pu m’aider à comprendre les inscriptions tracées sur les feuilles jaunies par le temps.

Des annotations griffonnées à la va-vite dans une langue bizarre. Quelle situation absurde : Richard aurait dû choisir un mélomane !

Des pages glissèrent de mes mains. Je m’énervai, mais tout m’était égal maintenant. Emporté par la fièvre, j’en oubliai que j’étais un cambrioleur, un hors-la-loi, un violeur de secrets.

J’étais décidé à savoir, moi aussi.

Tout se produisit en même temps.

Des bruits de pas glissant sur le sol.

Une silhouette dans l’embrasure de la porte.

La clarté aveuglante d’un lustre.